Histoire de la Cité d'Alet

Ce promontoire dominant la mer et les terres environnantes attira l'homme dès le Néolithique. Les Phéniciens y débarquèrent avant de remonter la Rance, laissant sur place une de leurs marques destinées à être reconnues par leurs successeurs : une croix hellénique sculptée dans un rocher de l'anse Saint-Père. Vers l'an 80 avant notre ère, les Coriosolites, l'une des 5 tribus celtes occupant l'Armorique, s'y établirent et développèrent une cité dont ils firent leur chef-lieu. Pour se protéger contre d'éventuels envahisseurs, il en firent un éperon protégé au Sud par un fossé (un peu à l'image de ceux de Cancaval ou La Vicomté sur Rance) qu'ils doublèrent d'un talus afin d'en renforcer l'efficacité.

sortie de la cité d'Alet

Ils construisirent une ville dont une partie de l'approvisionnement était garanti par des échanges maritimes qu'ils assuraient sur la Manche entre la Grande Ile (la Grande-Bretagne) et le continent. Des constructions en bois et torchis couvrirent petit à petit une partie de la presqu'île dont la protection sera renforcée par une enceinte faite de pieux fichés en terre. En ce temps-là, la mer était bien plus retirée qu'aujourd'hui (le niveau se situait probablement de 7 à 8 mètres sous le niveau actuel) et une dune alluvionnaire protégeait la côte de la Pointe de La Briantais jusqu'à l'anse Saint-Père empêchant les eaux de parvenir jusqu'au pied des rochers. Les bateaux étaient alors échoués au delà de cette bande et, afin d'en permettre le chargement et le déchargement, des aménagements furent entrepris. Lorsque vous foulerez la plage et les rochers qui bordent Solidor, soyez attentif. Vous découvrirez alors, partant d'un des ponts à arches qui mène à la Tour, une voie taillée dans la roche et menant vers le large. C'est par là que passaient les charrettes contenant le fret : on y voit encore les traces des roues ayant taillé profondément la pierre.


escalier du bassin, cité d'Alet

A la base de la forteresse, juste à côté, à proximité de la falaise, les restes d'un ancien bassin de retenue laissent encore entrevoir une forme presque carrée accessible par quelques marches disparaissant progressivement sous une végétation nitratée comme il en existe malheureusement désormais sur toute la côte. Il s'agissait d'une réserve d'eau douce alimentée par une source jaillissant sur le rocher. Un ingénieux système de pompage permettait de desservir la cité en eau potable par un aqueduc dont il ne reste plus aucune trace.


voies sur la plage, cité d'Alet




Plus loin, la chaussée se divise en deux voies distinctes, elles aussi taillées dans le granit, au centre desquelles, sur le promontoire, un autre bassin fut creusé.





bassin de rétention, cité d'Alet

Bassin de rétention d'eau destinée à approvisionner les bateaux qui faisaient escale ou vivier permettant de conserver des poissons pour l'alimentation des occupants de la ville, cette construction et les autres démontrent la détermination d'une peuple à créer une cité qui deviendra leur capitale.



L'occupation romaine amènera toutefois un frein à ce développement et la ville sera incendiée vers l'an 10 de notre ère pour forcer la population à émigrer vers Corseul. Alet disparut alors pour devenir Reginca mais ne fut pas totalement abandonnée : sa situation stratégique lui permit de survivre et le milieu du 1er siècle y verra la construction de quelques maisons, en pierres cette fois.

Une tour massive surveille déjà l'estuaire, à l'emplacement actuel de la tour Solidor, et la fin du 3ème siècle verra l'édification de remparts ceinturant toute la cité, contrôlés par 8 tours et comportant deux entrées. Reginca verra alors sa population augmenter et sa prospérité s'accroître jusqu'au milieu du 4ème siècle. C'est sans doute une violente tempête ou un raz-de-marée qui en bouleversera l'aspect et le destin : la dune protégeant l'anse Solidor s'ouvrira sur une large brèche et les eaux s'engouffreront jusqu'au pied de la cité. Il ne restera plus désormais qu'une aire d'échouage limitée aux actuelles anses Saint-Père et Solidor pour permettre le trafic de bateaux dont le nombre ira dès lors en diminuant. Vers l'an 368, l'enceinte fortifiée de la tour Solidor sera édifiée et quelques cohortes de légionnaires romains, les Martenses, auront pour mission de diriger et défendre la ville. Ils y construiront un cantonnement comportant notamment un prétoire et un arsenal.

Au début du 5ème siècle, les Romains abandonnent la région. Alet redevient capitale des Coriosolites et poursuit encore son expansion pendant quelques décennies. Le début du 5ème siècle verra décliner l'activité économique et humaine jusqu'au 6ème siècle ou Alet tombera presque dans l'oubli.

Vers l'an 575, Tudunal (ou Ludunal) entreprend la redressement économique de la cité, tâche que poursuivra le prince Meliau à la fin du 6ème siècle. La cité retrouvera alors son importance économique et maritime et sera pendant de nombreuses années un rempart défendant la région contre la volonté d'asservissement par les Francs.


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