Corseul, capitale romaine des Coriosolites

C'est en 57 avant notre ère que Corseul entre dans l'histoire de la civilisation gallo-romaine, nommée par César dans la relation de la Guerre des Gaules.

Selon de nombreux ouvrages, elle était la capitale des Coriosolites, puissante tribu gauloise frappant monnaie et commerçant avec les Grand-Bretons. Cette peuplade avait aussi la mainmise sur les îles anglo-normandes, étape entre la Grande Ile et le Continent, annexées à son territoire. En réalité, l'actuelle Corseul n'était qu'une terre vallonnée où quelques agriculteurs-éleveurs étaient dispersés dans une campagne dont le seul centre urbain fut sans doute la butte de Montafilan où fut érigé un oppidum. Au 12ème siècle, la famille seigneuriale de Dinan présidera aux destinées de la région, s'installant dans le château de Montafilan bâti sur cette ancienne place forte qui contrôlait une voie reliant Avranches à la baie de Saint-Brieuc. Il ne reste de cette demeure que quelques ruines branlantes : une partie de l'enceinte et deux tours émergent d'une végétation qui l'envahit progressivement.

Bien avant cette époque et l'ère dite chrétienne, la situation stratégique de ce qui n'était alors qu'une communauté disparate la fera entrer dans l'histoire ...

ruines de Fanum Martis, actuelle Corseul

Choisie par les Romains en 50 avant JC pour en faire un axe situé entre les différentes régions qu'ils dominaient sur la Région coriosolite, elle vit sa prospérité s'accroître et fut pendant 400 ans un pôle de commerce et d'échanges important au carrefour de 5 voies d'accès.

Une ville vide d'habitants n'étant pas viable, les Coriosolites furent forcés de quitter Alet incendiée pour s'établir à Fanum Martis et participer à l'essor de la Cité.

C'est ainsi qu'elle deviendra leur nouvelle capitale, constituant une métropole administrative, économique mais aussi religieuse, à partir de l'an 10 avant notre ère.

ruines de Fanum Martis, actuelle Corseul

Au cours des années qui suivirent se développera un centre urbain de près de 110 hectares dont la richesse était soulignée par l'édification de villas romaines, d'un forum, de thermes et de temples, dont le plus important, érigé plus loin sur les hauteurs, fut celui que l'on nomma "Temple de Mars". A son apogée, Fanum Martis comptera près de 10 000 habitants.

Une partie de l'approvisionnement devant nécessairement s'effectuer par la côte et la Rance, il fallut créer une voie d'accès. Celle-ci aboutit à Taden qui devint un petit port de transit aujourd'hui disparu.


Les fouilles archéologiques ont mis à jour les fondations de ce qui était le centre commercial de Fanum Martis, juste à côté de la voie contemporaine qui traverse Corseul. Habilement mises en valeur et rejointoyées afin d'en assurer la pérennité, elles forment désormais une esplanade ouverte à tous.

C'est à moins d'une lieue de Fanum Martis, sur les hauteurs du village du Haut-Bécherel, point culminant de la région, que fut installé le Temple de Mars, sur une superficie d'un hectare. Il fut érigé à la fin du 1er siècle de notre ère, à l'apogée de Corseul.

temple de Mars au Haut Bécherel à Corseul

Entourant une cour de 250 mètres sur 200, 3 galeries-portiques accolées à des chapelles étaient dominées par l'ensemble monumental d'une tour polygonale dont 3 pans de mur continuent à défier le temps. C'était le choeur du temple, dominant l'ensemble à une hauteur de plus de 22 mètres, l'équivalent d'un immeuble de sept étages !
     Les briques de surface encore en place témoignent de la qualité des architectes et artisans qui élevaient ces monuments. Celui-ci était inspiré de l'architecture toscanne.
Une partie des fondations des murs d'enceinte a été déterrée de la gangue de terre qui l'avait submergée au cours des siècles. Partiellement restaurées, elles permettent de se faire une idée de l'importance du site.
     Cet édifice exemplaire n'aura vécu que deux cents ans : il disparaîtra à la fin du 3ème siècle, à la suite d'un incendie volontaire. Le plus grand temple romain jamais construit en Armorique n'aura pas résisté, lui non plus, à la folie destructrice de l'homme ...


Au cours des siècles, Corseul s'est vu dépouiller progressivement des témoins de sa splendeur. Les pillages successifs les disséminèrent dans toute la région.

temple de Mars au Haut Bécherel à Corseul

C'est ainsi qu'une partie des remparts de Saint-Malo seront édifiés avec les pierres de l'ancienne cité gallo-romaine.
     D'autres matériaux furent utilisés au 12ème et 13ème siècle pour la construction du château de Montafilan situé à quelques lieues. La ferme dite du Haut-Bécherel aujourd'hui en ruines, adossée au portique Sud, sera construite au 16ème siècle sur une partie des ses fondations et comportera aussi une partie des moellons qui formaient l'enceinte du temple ...

On en retrouve d'autres, de-ci, de-là ... jusque dans des proprétés privées dont les bâtisseurs n'avaient pas beaucoup de scrupules ...

Le départ des Romains au 4ème siècle marquera le début du déclin de la ville. La cité d'Alet reprenant de l'importance au carrefour des voies maritimes qui feront plus tard la puissance et la richesse de Saint-Malo, provoquera le commencement de la fin de son rayonnement.

Les attaques normandes du début du 5ème siècle et l'incendie qu'ils provoquèrent dans la Cité sonnèrent le glas de sa splendeur ...

Le voyageur de passage ne peut s'imaginer ce que fut Corseul, il y a bien longtemps !
Elle est devenue, au cours des ans, une paisible petite ville ... où l'on ne fait généralement que passer.

Ne soyez pas pressé lorsque vous y viendrez. Gravissez la colline qui mène au Haut-Bécherel et imprégnez-vous de l'atmosphère qui y règne. Fermez les yeux et écoutez : peut-être entendrez-vous le pas furtif d'un de nos ancêtres parcourant l'une des galeries, se dirigeant vers la cella afin d'y exprimer ses voeux.
     Descendez ensuite vers l'antique cité devenue Corseul. Vous y découvrirez un site où l'homme, curieux de son passé, a patiemment déterré une partie de ce que fut Fanum Martis : Monterfil, l'ancien quartier commercial de la capitale romaine des Coriosolites.


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