Phoque cherche phoque pour liaison sérieuse ...

Après être revenu maintes et maintes fois sur ses berges préférées, j'ai enfin revu Arthur, notre phoque de Rance.
C'est le surnom que lui ont attribué les riverains qui le voient de temps à autre rôder près de certaines cales.
Il n'a pas eu l'ai surpris de me revoir, il paraissait même attendre ma visite : j'ai cru voir dans son regard : "- Ah, tiens ! revoilà une vieille connaissance ! On s'est déjà rencontré, non ?"
Bref, la glace fut rompue immédiatement et je lui demandai de ses nouvelles.

"- Si tu savais", me dit-il (j'ai oublié de vous dire que, telles de vieilles connaissances, nous avons pu immédiatement nous comprendre, rien que par l'expression du regard ...), "je m'ennuie comme un rat mort !".

Interloqué, je m'enquis de la raison de cet ennui, non sans souligner que la Rance était plus fréquentée que la haute mer et que, par conséquent, il avait certainement de quoi se distraire !

"- Ah ! si tu savais ..." poursuivit-il, "- on voit bien que tu rentres tous les jours chez toi, que tu y retrouves tes pantoufles, ton fauteuil ... et surtout ta compagne ! Moi, je suis seul ! Et cela depuis que j'ai passé l'écluse du barrage, croyant trouver des copains ou des copines dans le coin ! Au lieu de cela, rien ! Des bateaux, des badauds, oui ! mais des phoques : non !
Tu avoueras que ce n'est pas normal pour un phoque aussi bien constitué que moi ! Regarde : je suis bien grasouillet, d'accord, aujourd'hui j'ai un peu le hoquet, mais dans l'ensemble, je ne suis pas un mauvais parti, non ?"
"- Tu n'as pas tort" lui dis-je, "mais pourquoi ces éraflures sur ton dos ?"
"- Ben, j'ai parfois cru apercevoir une âme-soeur, m'y suis quelque peu frotté ... pour me rendre compte, après coup, que c'était un doris qui passait ou une planche à voile qui ondoyait en surface ..."

"- Mais, bon, trève de bavardages, car je vois qu'il y a du monde qui arrive et je ne voudrais pas provoquer une émeute. Ecoute ..." me dit-il, "toi qui publie un site sur Internet, tu ne pourrais pas lancer un appel pour me trouver une compagne ; ça doit bien se trouver dans le coin, non ?"

"- D'accord, je vais essayer : je vais publier ta photo et même plusieurs, tiens, puisque tu es si sympathique. On verra le résultat ..."

"- Chouette ! t'es un pote ! J'espère que ça marchera !
Tu me tiens au courant, hein ! Je te vois souvent rôder sur les bords de Rance : c'est moi qui te trouverai, ne t'inquiète pas ! Bon, je file : les gens s'approchent ... allez, salut et à bientôt !"

Et après ce qui m'a semblé être un sourire, un peu triste, Arthur a plongé dans l'eau, en faisant un signe amical de la nageoire ...

A bientôt, Arthur !

... et je m'en suis retourné à ma balade, non sans préparer mentalement l'article que j'allais écrire pour l'aider : c'est celui que vous lisez ici.

Alors, si vous avez parmi vos connaissances un petit phoque en manque d'affection, un bout de chou rondouillard qui voudrait voir du pays, n'hésitez pas : envoyez-le dans l'estuaire de la Rance : un copain l'attend avec impatience !