Le château de La Bellière

Le charme est rompu, sans doute, mais pas la balade : poursuivez donc votre découverte. Deux choix s'offrent à vous : soit pousser une pointe jusqu'au château de La Bellière, soit poursuivre le sentier qui vous ramènera, bien plus loin et après un détour au coeur des terres pleudihannaises, vers les bords de Rance ...

château de La Bellière, façade avant

En remontant l'étroit chemin carrossable, vous arriverez à la départementale qu'il faudra traverser si vous désirez voir une des demeures les plus chargées d'histoire de la région. Vous ne pourrez toutefois pas entrer dans la propriété, celle-ci n'étant ouverte au public qu'en de rares occasions.

Blotti derrière un étang qui constituait auparavant une partie de ses défenses, son allure austère dénote, peut-être, le caractère de ses bâtisseurs mais aussi la prudence qui présidait à la construction des demeures des seigneurs de l'époque.


château de La Bellière, arrière

A l'origine, le château fut conçu comme une place forte, quoique n'ayant aucune vocation militaire, (les murs extérieurs ont une épaisseur de 1,50 m à la base, s'affinant jusqu'à 80 cm à leur sommet) et entouré de douves. Il ne subsiste de ces dernières que 3 étangs, dont l'étang principal dans lequel se mire aujourd'hui la façade arrière de la bâtisse.

A cette époque, elle ne comportait qu'un bâtiment rectangulaire flanqué d'une tour abritant l'escalier à vis. On y entrait en empruntant une triple allée bordée de chênes sur près d'une lieue aboutissant à la petite route reliant le village à celui de Pleudihen, près du lieu-dit "La Ville Bénefray".

Cette allée monumentale a aujourd'hui presqu'entièrement disparu et il n'en reste qu'une centaine de mètres de voie, dans l'enceinte de la propriété. Constituée d'une allée piétonnière, une cavalière et une carrossable, elle aboutissait à l'entrée originelle du château.


La ferme construite dans son axe à partir du 17ème siècle sera percée de 3 porches afin de permettre le passage des visiteurs.

château de La Bellière, ferme

Au delà de la ligne de chemin de fer qui la barrera à partir du 19ème siècle, cette allée devenue simple voie carrossable ne fait plus partie du domaine mais est toujours visible, traversant les anciennes terres du château devenues aujourd'hui propriété d'un agriculteur. Quelques chênes mourants semblent encore aujourd'hui en être les gardiens, derniers témoins d'un lent démembrement de la propriété devenu nécessaire au cours des ans. Elle ne s'étend plus désormais que sur 17 hectares dont l'essentiel est constitué des bois qui l'entourent. Aujourd'hui, l'ancienne allée cavalière a perdu son usage et une voie carrossable a été aménagée en face de celle menant au moulin du Prat.

château de La Bellière, cheminée et tour

Le nombre et la taille des cheminées qui coiffent l'édifice est peu commun : 12 fûts de 5 à 8 mètres de hauteur ! Leur architecture l'est tout autant, caractérisée par des formes octogonales s'élevant haut dans le ciel. Plusieurs châteaux et manoirs bretons sont coiffés de cheminées semblables, le château de La Roche-Jagu en Ploëzal en étant le plus connu. Celles de La Bellière comportent toutefois un élément de décoration étonnant : le sommet de plusieurs de ces cheminées est orné d'une ou deux couronnes de cornes inversées en ardoise brute, fixées sur la tranche.

Si la façade avant est tout en lignes droites, ponctuée par un bâtiment bas en accolade qui ne fut construit qu'au 14ème siècle, l'arrière est quelque peu adouci par la haute tour abritant l'escalier à vis desservant les étages. Edifiée en plan octogonal (comme les cheminées !) jusqu'au deuxième étage, elle est rehaussée d'une rotonde à l'allure de tour de guet. Elle rappelle par un détail que cette bâtisse avait jadis une allure de place-forte : les meurtrières. Celles-ci ont progressivement disparu des autres parties du château au profit d'ouvertures plus grandes, de fenêtres permettant d'ajouter au confort de ce qui devint par la suite une demeure cossue à l'usage de gens fortunés.

château de La Bellière, chapelle

La chapelle , la partie basse qui s'appuie sur la façade arrière du château et la tour carrée qui jouxte la tour ronde seront construits au 14ème siècle. Cette chapelle sera longtemps le lieu de culte où seront dites les messes auxquelles assisteront les habitants du village. Elle abritera la sépulture des propriétaires du château jusqu'à la fin du 20ème siècle.

La ferme et les deux pavillons blottis dans une jardin clôturé d'une enceinte en pierre furent érigés du 17ème au 18ème siècle.

Le premier seigneur du château de La Bellière sera Raoul de Dinan-Montafilant (1237-1287), à partir du milieu du 13ème siècle. Cette seigneurie était parmi les plus importantes du pays, ayant droit de haute et basse justice. Il aura un fils, également prénommé Raoul, qui lui succèdera jusqu'à son décès survenant en 1300 et l'héritier sera le troisième Raoul de la famille, vicomte de Poudouvre, décédé en 1329. Le quatrième seigneur de la Bellière sera son fils Guillaume. Les héritières de ce dernier, Jeanne et Philippine, reprendront le titre de vicomtesse de la Bellière en 1337. Jeanne épousera un Raguenel issu de la branche cadette des comtes de Dinan, introduisant ainsi le nom d'une famille qui deviendra illustre par la filiation d'une de ses filles et règnera sur le domaine durant 150 ans.

En effet, l'histoire de cette demeure retient essentiellement que Tiphaine Raguenel naquit ici, fille de Jeanne de Dinan vicomtesse de La Bellière, héritière du château, et de Robin Raguenel seigneur de Châteloger. Selon certains historiens, c'est ici même, dans la chapelle du château qu'elle épousa Bertrand Duguesclin en 1360. Morte en 1372 à l'age de 33 ans, son coeur fut inhumé dans la chapelle des Jacobins à Dinan ; celui de son époux vint l'y rejoindre en 1380. Ils furent transférés en 1810 en l'église St-Sauveur. Une lignée de "Jean" qui porteront pour l'histoire les particules 1, 2 et 3 seront les héritiers successifs du château, ajoutant au titre de vicomté de la Bellière celui de Malestroit. Le dernier des Jean décèdera le 24 décembre 1471, laissant deux héritières, Jeanne Raguenel et Françoise Raguenel dite de Malestroit.

En 1767, le château entrera dans le patrimoine de la famille Collin de Boishamon qui ajoutera dès lors le titre de la propriété à son nom.

Partiellement entouré d'étangs et blotti dans un écrin de verdure, cet édifice d'une froideur typiquement bretonne, est presque impossible à voir sans entrer dans le parc ... mais il s'agit d'une propriété privée. Ce n'est qu'en hiver, lorsque les arbres ont perdu leurs feuilles, que l'on peut en apercevoir la haute stature, depuis la route venant de Pleudihen.

Redescendez vers le moulin du Prat ... pour mieux remonter en direction de Quincoubre.


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